Bourges, Saint-Étienne - Portail du Jugement dernier, tympan, registre 2 : la séparation des élus et des damnés
Localisation
Édifice : Cathédrale Saint-Étienne
Extérieur, Façade occidentale
Portail du Jugement dernier, Tympan, registre 2
Datation
2e quart 13e siècle
Description et iconographie
Techniques de l'œuvre : Sculpture
Iconographie :
Scènes : Séparation des Élus et des Damnés ; Sein d'Abraham ; Pèsement des âmes ; Enfer ; Ornement à forme végétale ; Ornement à forme animale : Dragon
Cycles : Jugement dernier
Description : 1) Partie gauche : les élus, au nombre de huit seulement, dont deux enfants nus, sexués, ne forment pas un groupe compact ou un cortège dense. Conduits par Pierre, ils se dirigent sans hâte vers la porte du paradis, ouverte latéralement dans l'édicule en forme de ciborium où trône Abraham. À leur tête se trouve la figure (inaltérée) d'un franciscain, le dos de la main droite marqué d'une longue plaie ; on peut supposer que c'est saint François. Il est suivi par un jeune roi et une jeune fille. Derrière eux, à droite, un troisième élu, d'allure également juvénile, leur tourne le dos. Il paraît converser avec un ange qui élève à bout de bras un enfant nu brandissant une longue tige d'églantier. Celui-ci introduit une seconde file d'élus : un très jeune homme, la tête ceinte d'une couronne de fleurs à cinq pétales, et une jeune femme souriante arborant une coiffe à mentonnière et un bourgeon d'iris dans la main. En tête, un second enfant nu est présenté dans les bras d'un ange. Il tient dans la main droite une petite boule, de la taille d'une pomme.
Abraham, en figure du Paradis, est isolé sous un édicule. Il tient les âmes des élus dans un linge serré contre sa poitrine. Sur le fronton de son dais, trois anges tendent des couronnes aux bienheureux. 2) Centre : l'immense figure de saint Michel empiète sur le domaine du mal. Tenant la balance dans sa main droite, il est tourné vers les damnés et protège de sa main gauche un élu, un ressuscité adolescent que convoite un démon. 3) Partie droite : les damnés sont rangés également sur deux registres. Ils sont poussés ou portés vers la marmite par des démons hideux. Le premier d'entre eux (à gauche), ses attributs sexuels en évidence, avec une queue en forme de serpent et une tête grimaçante sur le ventre, pousse devant lui un damné. Le démon suivant, qui a des seins pendants en forme de têtes bestiales, porte au-dessus de sa tête un damné renversé. Deux démons activent les flammes de la gueule infernale ; celui de droite a enfoncé sa jambe gauche dans la bouche du monstre et pèse de toutes ses forces contre la commissure de ses lèvres. Au-dessus de la scène, frise de feuillages avec, au centre, deux dragons entrelacés.
Abraham, en figure du Paradis, est isolé sous un édicule. Il tient les âmes des élus dans un linge serré contre sa poitrine. Sur le fronton de son dais, trois anges tendent des couronnes aux bienheureux. 2) Centre : l'immense figure de saint Michel empiète sur le domaine du mal. Tenant la balance dans sa main droite, il est tourné vers les damnés et protège de sa main gauche un élu, un ressuscité adolescent que convoite un démon. 3) Partie droite : les damnés sont rangés également sur deux registres. Ils sont poussés ou portés vers la marmite par des démons hideux. Le premier d'entre eux (à gauche), ses attributs sexuels en évidence, avec une queue en forme de serpent et une tête grimaçante sur le ventre, pousse devant lui un damné. Le démon suivant, qui a des seins pendants en forme de têtes bestiales, porte au-dessus de sa tête un damné renversé. Deux démons activent les flammes de la gueule infernale ; celui de droite a enfoncé sa jambe gauche dans la bouche du monstre et pèse de toutes ses forces contre la commissure de ses lèvres. Au-dessus de la scène, frise de feuillages avec, au centre, deux dragons entrelacés.
Bibliographie : Brugger Laurence et Christe Yves, Bourges, la cathédrale, Saint-Léger-Vauban, Zodiaque, 2000 (pour le tympan, p. 286-312).
Notes
Notes sur l'œuvre : 1) Brugger et Christe (op. cit., p. 303-305) considèrent que certains indices iconographiques présents dans ce registre pourraient confirmer leur hypothèse de l'utilisation de sources juives pour l'iconographie de la façade de la cathédrale :
- l'importance inhabituelle de la figure d'Abraham, assis sous un dais et personnifiant à lui seul le Paradis ; - la présence supposée dans le cortège des élus de symboles liturgiques liés à la Fête des tabernacles (Sukkot), le "lulab" et l'"ethrog" (allusion à l'arbre de vie et son fruit, symbole de la foi avec laquelle on se présente devant le Christ juge) ; - l'association à ces symboles juifs de deux enfants nus, soutenus par des anges : le premier tient dans la main ce qui pourrait être assimilé au "lulab", alors que le même objet est associé, chez l'enfant qui clôt le cortège, à un rameau garni de feuilles lancéolées et de fleurs à cinq pétales. Or le terme latin "puer" (enfant) est défini dans divers recueils de « Distinctiones », et l'on y trouve une identification des enfants avec le peuple juif – enfants sauvés à la fin des temps comme cela est annoncé dans les Écritures. Cette assimilation est retrouvée dans l'office de l'Épiphanie de la « Summa de officiis ecclesie » de Guy d'Orchelles, magister à Paris, mort entre 1225 et 1233. L'idée de la conversion des juifs, sauvés sous leur forme « puérile », fondée sur Jean 3,5, est un thème débattu par Guillaume de Bourges dans l' « Epistula ad Hebreos » ; la nécessité d'une sauvegarde des juifs et de leur conversion finale est une constante dans les textes exégétiques chrétiens et les bulles papales au XIIIe siècle. 2) Note sur l'objet dans la balance de saint Michel : Selon le rapport de Didron de 1848 critiquant les travaux de restauration de la cathédrale au XIXe siècle, une âme est assise dans un plateau de la balance tandis qu'avant la restauration un poids s'enfonçait dans l'autre, poids dont Didron n'avait pu identifier l'espèce. Le restaurateur du XIXe a tranché l'incertitude en y mettant un calice. SOURCE : DRAC Centre, « Bourges, cathédrale Saint-Étienne. Les principales campagnes de restauration de la façade ouest », ca 2002. 3) Un décor de fleurs de lys sur le manteau du roi du portail central est peut-être une évocation de Philippe le Bel qui accorda son soutien financier à l'entretien de l'édifice, et plus particulièrement à l'archevêque de Bourges Gilles de Rome qui fut son précepteur. SOURCE : Aubanton Frédéric et Jourd'heuil Irène, Introduction. Récents travaux menés sur la cathédrale de Bourges, in « Cathédrale de Bourges » [actes des colloques de Bourges 2009 et 2012], dir. I. Jourd'heuil, S. Marchant et M.-H. Priet, Tours, Publications universitaires François-Rabelais, 2017, p. 15-32.
- l'importance inhabituelle de la figure d'Abraham, assis sous un dais et personnifiant à lui seul le Paradis ; - la présence supposée dans le cortège des élus de symboles liturgiques liés à la Fête des tabernacles (Sukkot), le "lulab" et l'"ethrog" (allusion à l'arbre de vie et son fruit, symbole de la foi avec laquelle on se présente devant le Christ juge) ; - l'association à ces symboles juifs de deux enfants nus, soutenus par des anges : le premier tient dans la main ce qui pourrait être assimilé au "lulab", alors que le même objet est associé, chez l'enfant qui clôt le cortège, à un rameau garni de feuilles lancéolées et de fleurs à cinq pétales. Or le terme latin "puer" (enfant) est défini dans divers recueils de « Distinctiones », et l'on y trouve une identification des enfants avec le peuple juif – enfants sauvés à la fin des temps comme cela est annoncé dans les Écritures. Cette assimilation est retrouvée dans l'office de l'Épiphanie de la « Summa de officiis ecclesie » de Guy d'Orchelles, magister à Paris, mort entre 1225 et 1233. L'idée de la conversion des juifs, sauvés sous leur forme « puérile », fondée sur Jean 3,5, est un thème débattu par Guillaume de Bourges dans l' « Epistula ad Hebreos » ; la nécessité d'une sauvegarde des juifs et de leur conversion finale est une constante dans les textes exégétiques chrétiens et les bulles papales au XIIIe siècle. 2) Note sur l'objet dans la balance de saint Michel : Selon le rapport de Didron de 1848 critiquant les travaux de restauration de la cathédrale au XIXe siècle, une âme est assise dans un plateau de la balance tandis qu'avant la restauration un poids s'enfonçait dans l'autre, poids dont Didron n'avait pu identifier l'espèce. Le restaurateur du XIXe a tranché l'incertitude en y mettant un calice. SOURCE : DRAC Centre, « Bourges, cathédrale Saint-Étienne. Les principales campagnes de restauration de la façade ouest », ca 2002. 3) Un décor de fleurs de lys sur le manteau du roi du portail central est peut-être une évocation de Philippe le Bel qui accorda son soutien financier à l'entretien de l'édifice, et plus particulièrement à l'archevêque de Bourges Gilles de Rome qui fut son précepteur. SOURCE : Aubanton Frédéric et Jourd'heuil Irène, Introduction. Récents travaux menés sur la cathédrale de Bourges, in « Cathédrale de Bourges » [actes des colloques de Bourges 2009 et 2012], dir. I. Jourd'heuil, S. Marchant et M.-H. Priet, Tours, Publications universitaires François-Rabelais, 2017, p. 15-32.
Notice : Béatrice Coquet
Date de la notice : 13/06/2010
Photos de l'œuvre
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